Les Occidentaux condamnent avec fracas l’agression russe en Ukraine, mais ils ferment les yeux sur une autre guerre, plus silencieuse, plus insidieuse : celle menée contre la République démocratique du Congo (RDC). Une guerre économique où les multinationales et les États complices pillent, par procuration, les ressources d’un pays qui regorge de richesses stratégiques. Une guerre qui dure depuis 30 ans et qui a fait plus de 6 millions de morts.(Amnesty International)

Le pays regorge de minerais stratégiques comme le cobalt, le cuivre et le coltan essentiels pour les multinationales européennes, qui servent entre autres pour les smartphones, les batteries, mais qui sont aussi utilisés dans l’industrie de la défense, dans la transition verte et dans l’aéronautique. Les multinationales, plutôt que d’acheter directement en RDC sous la pression des régulations internationales, préfèrent passer par Kigali, qui blanchit littéralement ces ressources en les exportant sous son propre label (BBC).

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Une main sur la bouche, deux doigts de l’autre main sur la tempe, les joueurs de l’équipe nationale de la République démocratique du Congo ont dénoncé le silence face aux violences qui font rage dans l’est de leur pays.

Ces derniers jours, le groupe armé M23 a intensifié ses activités dans la région, provoquant des affrontements avec l’armée congolaise et des déplacements massifs de population. Ces combats ont entraîné une crise humanitaire, avec des milliers de personnes fuyant leurs foyers pour chercher refuge dans des zones plus sûres.
Malgré l’implication avérée du Rwanda dans le soutien aux rebelles du M23, l’Union européenne et plusieurs puissances occidentales continuent d’injecter des centaines de millions d’euros dans l’économie rwandaise.

Depuis 2021, l’Union européenne a injecté plus de 860 millions d’euros au Rwanda dans le cadre du programme Global Gateway. Ce plan, censé financer des projets d’infrastructure et de développement, se retrouve, en réalité, instrumentalisé pour soutenir un régime dont les accointances avec les milices congolaises sont avérées (La Croix).

40 millions d’euros ont été alloués par l’UE pour le déploiement des forces rwandaises au Mozambique, en pleine expansion militaire de Kigali en Afrique de l’Est. Un financement qui survient alors que les services de renseignement et les rapports d’ONG dénoncent l’implication directe du Rwanda dans l’exploitation des minerais congolais par l’intermédiaire de groupes armés (Afrikarabia).

Quand la Russie envahit l’Ukraine, l’Union européenne et les États-Unis réagissent avec une rapidité et une sévérité exemplaires : sanctions économiques massives, gel des avoirs, exclusion des banques russes du système SWIFT, interdiction des exportations de technologies stratégiques. Mais quand le Rwanda est pris la main dans le sac : Silence !

Kigali échappe aux sanctions, et mieux encore, se voit récompensé par des accords économiques. En janvier 2024, l’Union européenne a signé un accord d’approvisionnement en minerais stratégiques avec le Rwanda, alors même que la majorité de ces ressources provient des mines de l’est congolais, pillées par des milices liées à Kigali (Le Point).

Comment justifier une telle complaisance ?

Le Rwanda est présenté comme une « success-story » africaine, un pays modèle où la stabilité et le développement économique priment. Un narratif savamment entretenu par des agences de communication et des think tanks influents en Occident.

En parallèle, Kigali s’impose comme un acteur clé du dispositif militaire international en Afrique, notamment par sa contribution aux missions de maintien de la paix. Le Rwanda est aujourd’hui le troisième plus gros contributeur de Casques bleus à l’ONU, et renforce ainsi son statut de gendarme du continentLes Casques bleus sont des forces multinationales qui ont pour mission de maintenir la paix. Ils sont composés de personnels nationaux placés sous l’autorité de l’Organisation des Nations Unies (ONU). Ils se composent de civils, de militaires et de forces de police (ForbidenStories). L’occident se sert de ce prétexte pour ignorer les rapports accablants sur les exactions du M23, les pillages et les crimes de guerre perpétrés dans l’est du Congo (Amnesty International).

Pendant que Kigali profite de la manne financière et diplomatique occidentale, la RDC, elle, paye le prix fort. La RDC détient 50 % des réserves mondiales de cobalt, 75 % des réserves de coltan et d’importantes quantités d’or, de cuivre et de diamants. Pourtant, ces richesses profitent davantage aux multinationales occidentales et aux élites rwandaises qu’aux Congolais eux-mêmes (Amsterdam & Partners).

Face à cette duplicité, les Congolais expriment de plus en plus leur défiance envers l’Occident, convaincus que leur pays n’est qu’un réservoir de matières premières à exploiter sans scrupules. Les ambassades de France, des États-Unis, de Belgique ont été attaquées et brulées ces derniers jours par une foule de manifestants accusant les puissances occidentales de laisser le Rwanda manoeuvrer à loisir.

La situation est insoutenable, et pourtant, les chancelleries occidentales persistent à détourner le regard. Jusqu’à quand ?

En 2023, les exportations de coltan du Rwanda ont explosé de 50 %, alors que ce pays n’en produit presque pas.

En décembre 2024, Apple a annoncé avoir cessé son approvisionnement en minerais provenant du Rwanda et de la RDC suite à des accusations d’utilisation de minerais extraits illégalement. Personne n’ira vérifier.

C’est un système organisé, où la guerre devient un outil économique pour l’Occident. Pendant que la RDC s’enfonce dans l’instabilité, les entreprises européennes et américaines profitent d’un accès privilégié aux minerais stratégiques.

Texte pensé par Benji et rédigé par Claudia Lomma (claudia@claudialomma.com)

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