Les citoyens croient encore détenir le pouvoir sur leur argent. Erreur fatale. Le système financier moderne s’oriente vers une prise de contrôle totale. Derrière les discours de modernisation et de lutte contre la fraude, un verrouillage progressif des libertés financières s’opère. Suppression du cash, « debanking » arbitraire, introduction de l’euro numérique : autant d’outils qui, entre les mains des banques et des États, peuvent devenir des instruments de censure et de coercition.

Loin d’être une simple évolution technologique, cette transformation progressive réorganise en profondeur les rapports de force économiques et politiques. Ce phénomène, qui touche aussi bien les particuliers que les entreprises, s’inscrit dans une logique de centralisation du pouvoir financier. Il en résulte une dépendance croissante vis-à-vis des institutions financières et des politiques monétaires dictées par des organismes centralisés.

Le “débanking”, une censure économique impitoyable

Les banques peuvent, du jour au lendemain, fermer un compte sans explication convaincante. Officiellement, elles invoquent des raisons de gestion du risque ou de conformité réglementaire. En réalité, certaines décisions s’apparentent à de la censure économique. L’accès à un compte bancaire est devenu un prérequis pour participer à l’économie moderne, et son retrait représente bien plus qu’un simple désagrément administratif : il équivaut à une exclusion pure et simple du système financier.

L’affaire Nigel Farage a révélé les dangers de ce phénomène. En 2023, la banque Coutts, filiale de NatWest, a supprimé son compte bancaire, non pour des raisons financières, mais parce que ses opinions politiques ne correspondaient pas aux « valeurs » de l’établissement. Une banque privée s’est donc arrogé le droit de sanctionner un individu sur des bases idéologiques.

Cette situation pose une question essentielle : dans quelle mesure les banques peuvent-elles arbitrer l’accès aux services financiers sur des critères politiques ou moraux ? Une banque est-elle encore une simple entreprise privée lorsqu’elle détient le pouvoir d’exclure des individus ou des organisations de l’économie ?

Discrimination bancaire : un problème systémique ?

D’autres cas montrent que certaines communautés sont touchées de manière disproportionnée.

Des musulmans britanniques ont vu leurs comptes clôturés en masse, sans justification claire. Certaines banques auraient appliqué des mesures de précaution excessives sous prétexte de lutte contre le financement du terrorisme, sans qu’aucune preuve ne vienne appuyer ces décisions. Des personnes d’origine nigériane vivant en Europe ont également été confrontées à des fermetures soudaines de comptes bancaires. La méfiance des banques à l’égard de certaines nationalités, perçues comme « à risque » en raison de préoccupations liées à la fraude, conduit à une exclusion financière ciblée.

Lorsqu’une banque ferme un compte, l’argent n’est généralement pas perdu, mais son accès peut être bloqué. La banque peut demander au client de transférer ses fonds vers un autre établissement. Si aucune solution n’est trouvée, l’argent peut être placé sous séquestre. En cas de soupçon de fraude, les fonds peuvent être gelés pour une durée indéterminée, voire confisqués après enquête. Cette fermeture peut entraîner des difficultés immédiates, comme l’incapacité de payer un loyer ou de percevoir un salaire.

Sans accès au système bancaire, ces personnes sont exclues de l’économie moderne : impossible de payer un loyer, de recevoir un salaire, d’accéder à des services essentiels. Le « debanking » devient un outil de marginalisation sociale et politique.

Vers un monde sans cash

Le cash disparaît par étapes insidieuses, plafonds de paiements en espèces abaissés, refus progressifs des commerçants, fermetures de distributeurs automatiques… À terme, l’objectif est clair : rendre les paiements numériques incontournables.

Sans cash, chaque paiement devient traçable. Aujourd’hui, un billet de 50 euros peut être utilisé sans intermédiaire, sans surveillance, sans restriction. Avec un système 100 % numérique, chaque euro est sous contrôle bancaire.

Chaque achat laisse une trace, révélant qui achète quoi, où et quand. Ces informations deviennent exploitables pour la surveillance économique et sociale. Un simple algorithme peut décider qu’une transaction ne respecte pas certains critères et la rejeter sans explication. En cas de crise bancaire, de cyberattaque ou de décision arbitraire, il devient impossible de récupérer son argent sous forme physique, laissant chaque individu totalement dépendant du système bancaire.

Les ménages défavorisés, premières victimes

L’élimination du cash fragilise les populations les plus vulnérables. Les non-bancarisés, comme les sans-abri et les travailleurs informels, perdent leur dernier moyen d’échange. Les personnes âgées ou peu à l’aise avec les paiements numériques se retrouvent exclues. Les petits commerçants et indépendants, qui utilisent le liquide pour éviter les frais bancaires excessifs, voient leurs marges réduites.

Le cash est une soupape de sécurité. Sa suppression place chaque individu sous la dépendance d’un système bancaire opaque et contrôlé.

Une société sous contrôle financier ?

Avec ces évolutions, la liberté financière devient conditionnelle.

Conditionnelle à l’acceptation des règles bancaires : un compte peut être fermé sans recours. Conditionnelle au respect des directives étatiques : des restrictions peuvent s’appliquer en fonction des politiques gouvernementales. Conditionnelle à la stabilité du système : une panne, une crise bancaire, et l’accès à son propre argent devient incertain.

Le renforcement du contrôle financier soulève des questions fondamentales sur les limites acceptables de la régulation monétaire. Jusqu’où un État ou une institution peut-elle intervenir sans porter atteinte aux droits fondamentaux ?

L’argent n’est plus seulement un outil d’échange, mais un levier de pouvoir. Chaque restriction imposée sur son utilisation façonne directement les libertés individuelles. La suppression progressive du cash, le contrôle bancaire et la numérisation des transactions ne sont pas de simples évolutions technologiques : ils redéfinissent en profondeur la capacité des citoyens à agir librement. Lorsqu’une autorité peut bloquer des fonds, restreindre un accès bancaire ou influencer le comportement économique d’une population, elle détient un pouvoir considérable sur la société. Sans garde-fous, cette centralisation des flux financiers devient un outil de régulation politique et sociale, où chaque transaction peut être scrutée, approuvée ou interdite. Une transition s’opère, presque imperceptiblement, vers un modèle où l’indépendance économique dépend non plus de la volonté individuelle, mais des directives institutionnelles. Une question demeure : jusqu’où ce contrôle peut-il aller avant que la liberté économique ne devienne une illusion ?

L’argent n’est plus un simple moyen d’échange. Il devient un outil de contrôle.

Retirer l’accès bancaire d’un individu, limiter l’usage de sa monnaie, suivre en temps réel ses dépenses : ce n’est plus un scénario hypothétique, mais une réalité qui s’impose progressivement.

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